D'origine guadeloupéenne, Spawny est un des dj pionniers francophone à avoir transporté la Soca de ses platines à nos oreilles. Que ce soit en France, en Guadeloupe ou à l'étranger, Dj Spawny continue de s'imposer à notre plus grand bonheur et nous a offert quelques minutes de son temps pour nous parler de lui.

BJ : Quelle est pour toi l'essence de la soca en trois mots ?
DJ SPAWNY : “ Love, Unity and Family”. ( Amour, Unité et famille ) Quand on va dans un événement Soca, on a cet esprit de famille : on ne se sent jamais seul. D’ailleurs mon tweet épinglé sur Twitter est la “SOCAlitude”, car tu sais que tu ne repartiras jamais seul.
BJ : Comment as-tu commencé à mixer de la Soca et pourquoi ?
DJ SPAWNY : Tout simplement naturellement parce que j'ai toujours entendu de la Soca dans mon enfance. J'ai aimé ça. Et quand j’ai commencer à mixer, je me suis naturellement mis à mixer de la Soca. J'en avais déjà sur mon PC. Et donc j'ai continué simplement.
La Soca, je ne la dissocie pas du carnaval pour l'instant, mais ça me rappelle des souvenirs. C'est vraiment cette atmosphère de relâcher son stress, d'être dans la rue, de tout lâcher et de profiter au maximum quoi !
BJ : Qu'est-ce qui t'as le plus attiré dans la culture Soca ?
DJ SPAWNY : La rue. "the road" en anglais. La Soca, je ne la dissocie pas du carnaval pour l'instant, mais ça me rappelle des souvenirs. C'est vraiment cette atmosphère de relâcher son stress, d'être dans la rue, de tout lâcher et de profiter au maximum quoi !
BJ : Comment as-tu réussi à te faire connaître et être booké sur des events Soca ?
DJ SPAWNY : Alors, ça c'est énormément de travail, de passion et encore plus de promotion, et de collaboration en fait ! ça a pris du temps et beaucoup beaucoup de travail de promotion. Et certaines collaborations qui ont été bénéfiques.
BJ : Si on te dit "Soca shot", "SheFete" et "Soca now in di place" : que peux-tu nous dire quant à ces séries ? ces univers ?
DJ SPAWNY : Justement, vous parlez d'univers et c'est exactement ça. À travers mes mixtapes j'essaye de montrer mon univers. J'essaie de transmettre par les séries vraiment des émotions. Le fait de conceptualiser c'est parce que j’aime raconter une histoire.
Quand je fais un mix, par exemple dans #SocaShot, c'est l'énergie de la Soca dont on a besoin dans la vie. Soit pour démarrer, soit en fin de journée ou quand on a un coup de mou. Pour #SheFete, je voulais tout simplement mettre, suite à une discussion avec mon équipe, les femmes, les artistes féminines de la Soca un peu plus en avant. Et mettre un mix exclusivement féminin. Dans Soca now in di place par contre, ça c'est ma vision de la Soca. Généralement sur une ou deux années. C'est ma vision de la Soca qui s'est déroulée en pensant un peu à tout le monde, ce que j'ai aimé, les îles. Trinidad. Barbade. Mais aussi, les small islands ( les petites îles ) vraiment moi ma version Dj Spawny de la Soca.

BJ : Et bien justement par rapport aux petites îles et entre guillemets les petits artistes, as-tu déjà incorporé des titres venant d'artistes peu connus en soirées ? ou encore dans tes mix ? Quel est ton retour d'expérience ?
DJ SPAWNY : : Ça m'arrive très souvent. Au début, je le faisais partout (rires). Il y avait plus ou moins de réussite sur certaines plateformes. J’ai appris avec l’expérience qu’il y a des plateformes ou des formats plus adaptés pour la découverte. Par exemple, en soirée, tout dépend du type d’évènement, mais ce ne sera pas forcément le moment. Si j’aime un son, je vais commencer à le mettre dans des lives, puis dans des mix. En fait, en soirée, ça crée des “freeze”. C'est-à-dire que quand le public ne connaît pas un son, il s’arrête de danser. Même si le son est bon, même si dans 3 ou 4 mois, ils vont sauter, ils vont tout écraser avec le son, au moment où ils découvrent le son pour la première fois dans une soirée, ça bloque les gens, ça les ralentit. Ça doit être de l’alchimie (rires) que nous les dj on appelle le “freeze”.
Mais oui, très souvent, je pousse des nouveaux artistes, qui sont très peu connus. Et surtout, ce que j’aime bien dans la Soca, c’est que ça se renouvelle énormément chaque année. Nouvelle saison, nouveau son. On oublie pas les anciens, mais pour que le public soit prêt pour le carnaval, il faut qu’ils soient à jour, et personnellement, il est hors de question que le public qui m’écoute arrive dans un carnaval complètement perdu. C’est quelque chose qui me tient à cœur.
BJ : Comment vois-tu la Soca dans cinq ans ?
DJ SPAWNY : Très bel enchaînement de questions ça !
Je pense que là Soca va s'étendre car on a besoin de good vibes. [...] Dans cinq ans je pense que ça va continuer à se développer. Notamment avec des featuring et des trucs plus commerciaux
BJ : …et plus particulièrement en France ?
DJ SPAWNY : Déjà dans cinq ans pour moi, la vibe va venir de la Caraïbe. Cela explique aussi peut-être mon move. Et la Caraïbe a toujours inspiré le monde. D'abord le reggae, et en spécialité le Dancehall.
Je pense que là Soca va s'étendre car on a besoin de good vibes. On a besoin de positivité en ces temps très durs. Dans cinq ans je pense que ça va continuer à se développer. Notamment avec des featuring et des trucs plus commerciaux, à plus large public, comme le son “Can you feel it” de Carib* avec Kerwin Dubois, Shenseea et le caméo de Dj Khaled : on est déjà quasiment à 1’000’000 de vues ! C'est très commercial. Et c'est vraiment destiné à toucher un plus large public. Il faut ce qu’il faut.
Dans cinq ans en France, j’espère que ça va continuer à se développer. On travaille pour ça, même si on est parti (de la métropole), on continue de travailler pour ça.

BJ : Quelle est pour toi la légende qui représente le mieux la Soca?
DJ SPAWNY : Pour répondre de manière bateau : Machel Montano.
C’est vrai pour tout le travail qu’il a accompli et tiré le genre. Je crois qu’il chante depuis ses dix ou neuf ans, si ce n’est pas moins. Et maintenant, il est déjà grisonnant, donc il ne lâche pas. Il traîne. Il tire vers l’avant. Et vers le monde la Soca. Après il y en a d’autres comme Farmer Nappy, qui sont là depuis très longtemps.
Kes que j’aime beaucoup et son band : c’est un groupe qui me parle énormément.
BJ : Sur le site internet www.djspawny.fr, une section "blog" est disponible. Peux-tu nous en dire plus quant à ce premier article de vulgarisation de la Soca ?
DJ SPAWNY : C’est mon site, ma vitrine. Dessus, il y a mes events, les mix, quelques photos. Il y a aussi une section blog, effectivement, sur laquelle on a initié, avec mon équipe, le mouvement de faire des articles pour “vulgariser” la Soca, comme vous dites. A L’époque où le site est sorti de terre, il n’y avait quasiment rien en français sur la Soca. Il faut des écrits. Il n’y a pas beaucoup de vidéos, donc il faut prendre l’espace médiatique et internet. Il faut au moins que quand on tape Soca sur internet, on sait ensuite de quoi ça parle.
C’est pour cela qu’il y a ce premier article sur mon site. Au moins quand tu tapes “Soca”, tu cherches un truc, et bien tu saches de quoi ça parle à peu près. Après si ça t’intéresse, ou si ça t’accroche, et bien tu feras des recherches.
BJ : Après tous les carnavals que tu as fait, pourrais tu nous donner ton top 3 ? des carnavals ? le top 3 des événements Soca en France ? dans les DOM ?
DJ SPAWNY : Dans mon top, il y a Trinidad et Toronto.
Trinidad parce que c'est la fête, c’est vraiment la fête ! C’est l'esprit de la fête ! Pendant le carnaval à Trinidad, tu ne dors pas. C'est vrai : je l’ai expérimenté. J’adore ça : l’esprit de la fête.
Toronto pour le nombre de groupes vraiment, vraiment, vraiment destinés à la Soca.
Et ensuite, mon carnaval de cœur. Et bien c’est Londres, parce que pour le coup c’est vraiment un carnaval caribéen. D’expats caribéens. Et ça représente toutes les îles. Toutes les îles sont représentées en vrai. Trinidad, Toronto & Londres.
En France : Oui Liming, Socahall & Battle Royale avec en quatrième Caribbean Break.
Dans les DOM : Brunch Soca, Rum Soca, Caribbean Dream

BJ : Maintenant que tu es en Guadeloupe, comment vois-tu la suite de ta carrière de Dj ?
DJ SPAWNY : On repart à l’aventure.
BJ : Au vu de ta carrière, quels sont les obstacles auxquels tu as dû et/ou continues de surmonter, dans le monde de la Soca ?
DJ SPAWNY : Premier obstacle : je dirais le bouyon. Ça, c’était un obstacle car j’étais vu comme un DJ bouyon alors que, de nos jours, le bouyon a pris de l’ampleur, et qu’il y en a dans chaque événement Soca. Il n’y a plus un événement Soca où il n’y a pas au moins 2 ou 3 sons de bouyon, ne serait-ce qu’Asa Banton. On a une sorte de monarchie, de royalité des acteurs trinidadiens qui bloquent un petit peu les “small islands”.
BJ : Quels seraient tes conseils pour quelqu’un qui souhaite se lancer dans la Soca en tant que DJ ?
DJ SPAWNY : Mes trois conseils, je les ai piqué à un de mes collègues, Kevin Crown : “Practice, perform, promote”. C’est vraiment très important. Tu t’entraines, tu te produits et, surtout, tu le montres. Les trois étapes sont ultra importantes. C’est clairement ce schéma là que j’ai suivi puisque tu peux être très fort en t'entraînant beaucoup, tu peux faire de belles performances, mais si personne ne le sait, tu ne dépasseras jamais ta chambre ou ton studio. Voilà les conseils que j’ai à donner.
BJ : Tu fais beaucoup référence à ton équipe, comment vous vous organisez ?
DJ SPAWNY : Alors, moi je suis beaucoup dans la discussion. On a Malaïka, mon manager qui gère tout ce qui est contrat à l’étranger, communication, démarchage avec les divers events. Et on a Brigitte qui est à la relation client, la communication. Et puis, il y a moi aussi (rires), community manager pendant 3 ans, qui ne dort pas (rires). C’est très important.
La Soca est une grande famille. On peut ne pas être d’accord sur tout, mais on reste une famille.
BJ : Y a-t-il de plus en plus d'amoureux francophones de la Soca aujourd'hui comparé à quand tu as commencé ? Pourquoi selon toi ?
DJ SPAWNY : Je ne dirais pas qu’il y en a plus pour l’instant. Enfin, il y en a certainement plus mais j’aimerais aborder la question d’une autre manière. On n’arrivait pas à les rassembler. Parce que jusqu’à mon départ, je suis tombé sur une belle rencontre, Trini Jungle Juice, qui est une envoyée spéciale. Ça fait plus de 10 ans qu’elle est en France, à Paris, et elle n'avait jamais entendu parler d’aucun événement Soca en Île de France. Et ça pour moi, c’est le grand drame, c’est qu’on arrive pas tous à se rassembler. Malgré la communication, on n'arrive pas à toucher tout le monde. C’est comme ça que j’aimerais plutôt aborder le problème. J’espère qu’il y en aura de plus en plus et qu’on en découvrira plus. Quand j’ai commencé, effectivement, je ne savais pas qu’il y en avait. On espère que ça va grossir et continuer à grossir comme ça. Il faut penser à éduquer les nouveaux arrivants parce que la Soca est une grande famille. On peut ne pas être d’accord sur tout, mais on reste une famille.
BJ : Quels sont tes nouveaux projets de mixtapes ? de production ou encore de composition ? tes prochains événements ? Où pouvons nous trouver tout cela ?
DJ SPAWNY : Alors, en terme de projet mixtape, il y en a une qui doit sortir très bientôt puisque tout les sons 2022 ont déjà commencé à sortir. Donc je vais très certainement créer une nouvelle série pour les nouveaux sons. Vraiment mettre les nouveautés en avant puisque hormis les mix, il reste les live, niveau radio, on est pas très ouvert pour passer des nouveautés et diffuser la culture. Donc ça devrait sortir incessamment sous peu.
Niveau production, composition, ça travaille doucement, on y est pas encore.
■ Crédits photo/vidéos : (Instagram) : @neishel.art @najahpvris @frenchcutlife
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